Depuis plus de trente ans, Yennah Torres se bat pour faire entendre la voix des femmes aux Philippines. Militante dès l’université, elle découvre très tôt les réalités sociales de son pays : discriminations, violence, injustice. Elle commence son engagement en luttant contre la privatisation de l’électricité sur les rives du lac de Lanao, à Mindanao. Très vite, elle s’implique aux côtés des femmes : autochtones, musulmanes, chrétiennes, migrantes.
Yennah devient l’une des figures de proue du mouvement féministe à Mindanao. À la tête de la coalition des femmes des trois peuples, elle milite pour une société plus égalitaire, malgré les résistances.
« L’égalité est une bonne condition partout. C’est bien d’être respectée, de contribuer, d’avoir le droit à notre corps et à notre parole. »
Femme engagée dans une société patriarcale et conservatrice, Yennah a payé le prix fort. Accusée en justice pour avoir dénoncé la corruption, elle a dû se défendre seule, sans moyens.
« Ils m’ont poursuivie non parce que j’étais femme, mais parce que j’étais militante. Et ça revient souvent au même. »
À MIHANDS, une association d’associations qui lutte sur l’île de Mindanao au sein d’un réseau humanitaire et de solidarité, elle met en place des politiques de protection contre les violences sexuelles et travaille avec les autorités pour faire émerger la parole des femmes dans des contextes où le silence est la norme.
« Sortir du silence, c’est le premier pas. Ensuite, il faut que la société soutienne les femmes, pas qu’elle les abandonne. »
Sa perspective holistique l’amène à faire des ponts entre les sujets environnementaux, de défense des droits, de solidarité internationale.
Pour Yennah, l’avenir passe par l’éducation des jeunes filles et la pensée critique.
« Beaucoup de femmes ne se sentent pas marginalisées, elles pensent juste que leur place est à la cuisine. Il faut changer ça, une femme a le droit d’être partout. »
Inspirée par les mouvements féministes du monde entier, elle croit fermement à la puissance de la solidarité internationale. « Nos luttes sont différentes, mais nos aspirations sont les mêmes : respect, justice, dignité. »